J’ai eu le plaisir d’être invitée au TechnoArk de Sierres pour une journée intitulée : « objets communicants et internet mobile, le futur du web ? », organisée par Rezonance.
On m’a demandé d’y parler du futur de l’entreprise et de l’impact d’internet sur le développement de l’entreprise.
Je vous livre, comme promis durant la conférence, le résumé de ce que j’y ai dit ainsi que les slides. Présentation sandrine Szabo – Technoark 2008
Vous trouverez également la vidéo réalisée sur place ici.
Imaginer résumer ma présentation en quelques phrases sera difficile mais voici la trame 😉
Vous n’avez pas forcément l’impression que les choses ont changé ces dernières années et que nos pratiques ont été affectées de manière considérable. Si je vous replonge il y a 20 ans en arrière, vous vous rendrez compte à quel point nous sommes devenu dépendant de la technologie et à quel point celle-ci a progressé.
Il y a 20 ans, les téléphones portables n’étaient pas encore démocratisé, internet comptait 50’000 noms de domaines et était encore réservé à une élite expérimentale et universitaire. Nos ordinateurs n’avaient pas encore windows 3.11, la célèbre version couleur, pas encore multitâche mais qui symbolise le démarrage des interfaces graphiques.
Nos ordinateurs, lents et dotés de peu de mémoire s’enorgueillissaient à peine des 386.
Il y a 20 ans pourtant, un homme, sans probablement s’en rendre compte, a été à l’origine d’une bouleversement incroyable dans nos économies figées et nos esprits mercantiles.
En offrant le fruit de ses développement à la communauté des développeurs, Linus Torvalds a créé une rupture. Cette rupture préfigure en fait des bouleversements de l’ordre économique mondiale et de la vague collaborative que nous ressentons aujourd’hui.
En donnant à une communauté le fruit d’un travail ingénieux et conséquent et en organisant une communauté qui par sa collaboration auto-gérée a su améliorer et fiabiliser le produit original, Linus est parvenu à ébranler l’industrie informatique toute entière.
Le pouvoir des foules, le cinquième pouvoir tel que décrit par Thierry Crouzet dans son ouvrage s’est mis en marche. De simples individu par leur contribution individuelle ou collectives, sont en mesure aujourd’hui de faire plier les plus grands.
Le rapport de force a changé.
Si ce n’est pas encore perçu comme tel par tous et ressenti dans tous les milieux, c’est néanmoins une réalité.
Le web 2.0, cette vague collaborative où le consommateur au pouvoir de simples blogs peut, par son action exprimer son appréciation ou son mécontentement sur les marques modifie de manière significative la marge de manoeuvre des entreprises. Le processus interactif et itératif, permet aux plus petits de se faire entendre, aux individus de partager, aux entreprises de progresser. Bien que cela modifie en profondeur les mentalités, la prise de conscience tarde à venir.
- Le consommateurs : insignifiant et peu pris en compte à part pour son porte monnaie par les marques hégémoniques et toutes puissantes, les consommateurs ont désormais le pouvoir. Leur voie, plus étouffée par des services clients habiles à maquiller les grognes, se porte sur la place publique, générant un tel écho parfois que les marques reculent. A l’instar de Nestlé qui du par exemple retourner à sa formule et à son packaging de base.
- Le collaborateur : Au coeur de réseaux de personnes lui même, le collaborateur a changé. Interconnecté, informé, il sait non seulement ce qui se passe ailleurs mais peut également véhiculer de l’information. Dans la guerre des talents qui nous menace, les entreprises qui n’entreront pas en résonance avec une culture d’entreprise positive, se retrouveront sans aucun doute à voir fuir leurs cerveaux. Si vous pensez que vos collaborateurs ne sont pas sur les réseaux sociaux, faites l’essai. Cherchez le nom de votre entreprise dans xing, linkedin et allez voir de quoi il retourne.
- Réputation : Il y a d’abord la réputation de votre entreprise. Vous n’êtes pas maître de cette réputation. Ce qui circule sur internet n’est généralement pas sous votre contrôle. D’où l’importance de vérifier ce qui s’y dit. Si c’est positif, utilisez-le, si c’est négatif, tâchez de comprendre pourquoi. Soit c’est fondé et il faut agir d’urgence pour corriger le tir et le faire savoir, soit cela ne l’est pas et il faut contre-attaquer.
- Crédibilité des marques : L’abus de marketing et de superlatifs, ainsi que les matraquages publicitaires et les techniques commerciales de masse ont passablement mis à mal la crédibilité des entreprises. Entre les slogans publicitaires et le service clients, il y parfois de tels écarts, que l’on ne parvient plus à faire confiance aux marques. Des livraison en 24h qui prennent un mois, un mauvais service après vente, des arguments marketing élimés; le client n’en veut plus. Les forums, blogs sont devenus le lieu de partage et d’échange sur ce que valent vraiment les marques. Un doute sur un hotel que vous souhaiteriez vérifier ? Un avis sur un restaurant ? Une expérience avec un site de vente en ligne ? Un garagiste malhonnête ? Tout laisse des trâces. Si vous voulez rétablir la crédibilité, il faut faire preuve de transparence et se servir justement de ces sites collaboratifs qui permettent aux clients de s’exprimer librement.
- Recrutement : Les candidatures en ligne ont remplacé le papier. En France, l’ANPE a supprimé le papier au bénéfice des annonces en ligne, c’est dire. On ne postule plus pareil. Les temps de réponses se sont compressées, et les manières de contacter les gens se sont assouplies : mail, porable mais aussi messageries (MSN, Sykpe…). L’identité numérique également va devenir une source de préoccupation : qu’est–ce qui se dit sur nous sur internet ? Des recruteurs commencent à recruter des « veilleur » dont le rôle consiste à trouver les bons profils et à se renseigner sur eux.
- Process : les processus de l’entreprise sont affectés par internet. Vous n’êtes plus en concurrence avec votre voisin, votre compatriote, mais toute la planète. La bataille est plus ardue, plus dense et le rythme accéléré. Un temps de réponse supérieur à 36h est devenu inacceptable. Internet c’est 24h/24 et 7j/7.
On peut accomplir des choses incroyable avec internet et les réseaux sociaux.
Considérer cela comme un passe temps ou un gadget c’est sous-estimer complètement les possibilités de l’outil. Je suis parvenue en une année à construire un réseau professionnel dense et complètement pertinent. A ceux qui voient cela comme une perte de temps, je leur répond que cela m’en a fait beaucoup gagner.
L’investissement mis dans la création et la fortification de ce réseau est sans commune mesure aux ressources qu’il m’aurait autrement fallut si j’avais du construire un réseau professionnel par des moyens traditionnels. Cela permet d’aller vite, droit au but et de se dispenser d’intermédiaires. Cela permet également de solidifier son réseau grâce à un entretien régulier qui vous prend peu de temps par rapport à ce que cela vous apporte.
Les temps ont changé.
Nous faisons face à un changement de paradigme.
Surement difficile à appréhender pour les entreprises, il est pourtant rentré dans l’ADN des jeunes générations. Elles ne connaissent que l’interconnexion, sont nées avec internet et la mobilité et pensent réseau avant tout. JP explique ce fossé qui existe entre l’entreprise est ses pratiques actuelles, le monde des technologie et l’arrivée des nouvelles générations. Que vous le vouliez ou non, le changement est là.
Il est possible et souhaitable de l’intégrer dès maintenant et de toute façon, il sera inévitable car les jeunes recrues, vos cadres de demain, seront eux habitués à fonctionner ainsi.
Il faut changer l’ADN de l’entreprise. A sa décharge, l’entreprise fonctionne encore et toujours selon les principes édictés par Taylor. L’entreprise a un rôle de production duquel découle une préoccupation de stabilité incrémentale et une séparation des rôles entre ceux qui pensent et ceux qui font. On se rend bien compte que la stabilité per se (le status quo) ne peut pas être une préoccupation première.
Dans un monde où la bataille de la production et des matières premières est perdue, seule les idées permettront de gagner. Nous devons par tous moyens favoriser l’innovation. Pour que celle-ci devienne partie intégrante de l’ADN de l’entreprise, il faut que le soucis de rupture, prime sur celui de stabilité.
L’innovation naît de ruptures, de changements. Ce sont des personnes qui ne pensent pas pareil.
Arrêtons de recruter les mêmes élites, des mêmes écoles, et favorisons la diversité. Intégrons la collaboration dans nos modes de management. Séparons le « contrôle » de la prise de décision pour que le manager devienne un « émulateur » de créativité et non plus un censeur.
La hiérarchie doit être revisitée pour recouvrer son sens premier. Cela ne doit plus être un empilement de petits chefs chacun responsables de 7 personnes environ et reportant au niveau supérieur. Plutôt que de diluer les équipes, réunissons les talents de manière libre et collaborative.
Propulsons les managers à un rôle d’animation et d’émulation en leur rendant leur fonction première : la prise de décision. Une base libérée, est une base confiante qui se sentira libre de mieux faire et donc d’innover. Là où il y a de la liberté, il y a de la confiance. Hiérarchie OUI, middle management à tout va, NON.
L’entreprise doit muter pour intégrer dans son exo squelette de nouvelles fonctionnalités.
Des flux RSS, des outils de recherche, de veille, des API pour partager et découvrir. Des wiki et un système de tag pour connecter les informations et les personnes et créer des relations favorisant des analyses. Des outils comme le blog, le micro blog qui permettent de développer vos sens et ressentir ce qui se passe autour de vous, en interne, en externe. La communication en temps réel, les réseaux sociaux pour optimiser votre capacité à interagir (des chercheurs avec d’autres, des commerciaux avec des clients, des responsables de marques avec des clients ou des universitaires…, les collaborateurs entre eux)…et bien sûr vos systèmes internes, revus et enrichi de toutes ces nouvelles sources.
Ce changement ne se produira évidemment pas du jour au lendemain et nous devrons encore adapté le modèle à chaque entreprise. Soyons clair, c’est avant tout un changement humain.
Nos moeurs, nos habitudes doivent évoluer. Au lieu de s’agripper au pouvoir du savoir, il va falloir mesurer son « influence » sur sa capacité à partager et faire collaborer (un énormes challenge pour les managers uniquement formés à contrôler).
Il y a du bon a prendre des nouvelles technologies et il faut comprendre que cela ne tue en rien ce qu’il y avait avant. Changer, ne signifie pas recommencer à zéro.
Evoluons pour devenir plus agiles. Favorisons les échanges d’idées et concentrons nous sur le maintien de nos forces vives. Nos talents, c’est le nerf de la guerre. La question qui va se poser dans les prochaines années sera moins de trouver des talents que de les conserver. Faisons en sorte que nos entreprises deviennent un lieu d’épanouissement où les idées fleurissent. Tentons, essayons, expérimentons tout ce que nous imaginons.
Rafraîchissons également nos idées. Que ce soit en envoyant vos employés dans des conférences où l’on parle d’avenir et de technologie, dans des salons; que ce soit de sponsoriser des communautés ou de favoriser les échanges ou encore de leur donner du temps de libre pour faire leurs propres expérimentations, favorisons tout ce qui permet aux idées de naître. A ceux qui se concentrent sur le contrôle aujourd’hui dans des processus internes rigides et non rentables, regardez comment fonctionnent les géants d’aujourd’hui.
Ce travail de présentation a été réalisé à partir des sources suivantes : Cette présentation doit beaucoup à Bertrand Duperrin, Si vous êtes intéressé par le management et l’impact des technologies sur notre manière de conduire les entreprises, son flux doit rejoindre rapidement vos lectures préférées.
Bertrand Duperrin – De l’entreprise 2.0 à l’entreprise tout court
Bertrand Duperrin – Réinventer le management
Bertrand Duperrin – L’entreprise 2.0 ne tuera pas la hiérarchie
Bertrand Duperrin – Le future du management
Le livre – Future of management
MIT sloan – What strategy is not
Ecrans 2.0 – L’anonymat n’est plus qu’une question de nostalgie
Mc Kinsey – innovative management
Mc Kinsey : how business are using web 2.0